vendredi 19 octobre 2012

Bohemian soul, l'âme bohême...

Depuis le 6 octobre 2012 et jusqu'au 23 janvier 2013  exposition Django Reinhardt, swing de Paris  à la Cité de la Musique (Paris).
 La capitale rend donc hommage au légendaire guitariste qui fit ses beaux jours ( et ses nuits enfiévrées) de la 1° moitié du XX° siècle.
Avec d' autres musiciens, dont le violoniste Stéphane Grapelli, Django a fondé le Quintette du Hot Club de France ( la célèbre formation jazzy ), les titres se sont enchaînés et sont devenus  autant de succès, ..de Minor swing, Dinah, Sweet Georgia Brown, Chicago,  jusqu'à l'incomparable "Nuages" ... .
Ligne mélodique déliée, ou accords saccadés en rythme énergique, la virtuosité est là, toujours présente, en dépit d'un accident qui ne laissera que 3 doigts valides à la main gauche de Django.  La performance de la technicité  de l'interprétation  n'en est que plus remarquable. On a beaucoup disserté sur ce musicien ultra doué. En employant bien des poncifs et des clichés : manouche, libre, autodidacte,  non conformiste, on a tenté, sans y parvenir,  de cerner l'homme à travers l'artiste. La manifestation parisienne offre là une occasion privilégiée pour s'en approcher, à travers la musique (des concerts in situ),  et grâce à l'exposition des objets personnels,  surtout les célèbres guitares de Django !!
 Décédé trop tôt,  à 43 ans (en 1953), D. Reinhardt laisse néanmoins un héritage musical considérable,qui fait encore des émules et des disciples. Défendre l'esprit et le genre, s'en inspirer sans le copier, voilà ce que réussissent les talentueux suiveurs  (qui se réclament de leur  prestigieux aîné entré dans la légende), en suivant leur propre parcours, et en se faisant un nom. : Sanseverino, Thomas Dutronc, Rafaël Faïs., Bireli Lagrène..
Corot
En résonance, et  toujours dans la capitale parisienne : depuis le 26 septembre 2012 jusqu'au 14 janvier 2013,  se tient l'exposition de 180 tableaux (du XV° au XX° s, de Léonard de Vinci à Picasso,) dans les galeries nationales du Grand Palais, sous le titre  "Bohêmes"  : cinq siècles d'errance et de liberté.
Van Gogh
La vie vagabonde des gens du voyage, des  gitans,des roms, des gypsies (venant d'Egypte, disait-on il y a quelques siècles), des tziganes, des boumians..,  est mise sur toile,  et se décline autour des thèmes revisités: les roulottes, les feux de bois, les groupes réunis dansant ou jouant de la guitare, les campements à l'orée des bois, ou aux portes des villages., la diseuse de bonne aventure, le rempailleur de chaises,  .. Cependant dans ces portraits brossés avec profusion de couleurs et d'attitudes, les artistes à travers les âges ont voulu autant  interpeller que témoigner. Loin d'un romantisme teinté d'exotisme, ces tableaux de "maîtres" narrent avant tout une aventure humaine de gens en mouvement. Souvent insaisissables parce que fréquemment pourchassés, ils deviennent mythiques mais savent évoluer au fil  du temps qui passe. Avec la musique et la danse pour exprimer tous les sentiments de l'âme, et les aléas d'une existence nomade, les bohémiens avaient ainsi  la force et la grâce, qui savaient capter le regard du peintre, ils les ont conservées.

 50° message d'International Culture Blog...

   Freelance Writer
Culture  Art  Patrimoine


 

mardi 16 octobre 2012

L'homme du pont

Bien plus qu'une arche,  qu'un passeur de l'histoire, ,  il en était l'âme...  L'archéologue Jean-Luc Fiches n'est plus, et le pont Ambroix,  symbole de cette station antique sur la Via Domitia, bien  tristement esseulé, se mire  dans les eaux du fleuve ...


Directeur de recherche au C.N.R.S. (UMR 5140, Montpellier/Lattes), l'archéologue,   d'origine Biterroise,  a consacré 40 années de sa vie professionnelle au quartier bas d'Ambrussum,  sur  la rive droite ( l'héraultaise) du fleuve Vidourle.  Sur le site, il fut le digne successeur du Dr Emile Marignan, marsillarguois   célèbre pour ses diverses recherches archéologiques au XIX° siècle , notamment sur le quartier haut d'Ambrussum (oppidum). 
Ambrussum -XIX°s.(Cl. Calvière)
E. Marignan
.Pendant plusieurs étés,  Jean-Luc Fiches dirigea  les diverses campagnes de  fouille de l'oppidum et de la station routière. Il en commentait volontiers les avancées et donnait bénévolement des conférences dans les diverses associations de la région. Avec patience, sens de la  pédagogie, humilité et  gentillesse , il se mettait à la portée du néophyte ou du candide, et savait faire partager son immense savoir, ses découvertes, sa passion du monde romain et de la région languedocienne. Ses travaux ont porté  sur maints aspects de l'histoire de l'Antiquité . On peut citer : les processus d'urbanisation et l'organisation de l'espace rural en Gaule méridionale, avant et après la conquête romaine. 

Quelques Ouvrages, parmi ceux d'une liste impressionnante
"Carte archéologique de la Gaule " (1996) en coll. avec A. Veyrac

"L'aqueduc de Nîmes et le Pont du Gard" (2001)

" Agglomérations gallo-romaines du Languedoc-Roussillon" 2 vol.  (2002) Coll. de recherche

"Archéologie et systèmes sociaux environnementaux " (2003)

" Actes de colloques " (2008)

"Ambrussum, une étape de la voie Domitienne" (2007)....


Inauguration du musée
Ambrussum : Non loin du terrain prospecté, un musée a été érigé sur le territoire de la commune de Villetelle. Après quelques péripéties administratives, il fut  inauguré en 2011,  en présence des officiels, et d'une foule compacte. Les discours furent nombreux, et l'homme du site n'a pas pris la parole.. mais il a été très longuement ovationné par  tous : les amis, les collègues, les gens  venus autant pour lui, que pour ce nouvel espace dédié au Pont romain
L'adieu émouvant qui a été rendu à J-Luc Fiches en ce 16° jour d'octobre 2012, dans la commune de St Christol (Hérault),  a donné lieu à un bel hommage, sobre, authentique, mais vibrant. Chacun se remémorait l'homme, le scientifique, le choriste, l'homme privé, .... et l'homme public qui savait attirer la sympathie, en suscitant le respect.  On s'est plu à souligner la noblesse de coeur,  alliée à celle de l'allure, sans oublier de mentionner la pointe d'humour et de dérision,  qui complétait le portrait fidèle, dressé avec une émotion bien compréhensible, et difficilement maîtrisable.  Cette brutale disparition déconcerte, surprend,  et attriste le monde de l'archéologie
site d'Ambrussum -quartier bas
De nombreux jeunes ont pu, certes, bénéficier de l'enseignement dispensé par Jean-Luc Fiches. Mais il va être difficile de poursuivre sans ce professionnel de référence, qui fut un réel maître à penser, à agir, et dont la liste des  travaux était loin d'être close. Des projets en suspens, des ouvrages à terminer,  une retraite à vivre en famille...., Jean-Luc laisse, trop tôt,  derrière lui, tous ces attachements...
 Il reste néanmoins : l’œuvre abondante du passeur de mémoire, l'empreinte de l'universitaire éclairé, et l'assurance que son nom soit à jamais attaché à un lieu: celui-là même qu'il a foulé de son pas, fouillé de sa main,  dont il a ravivé l'histoire, et dont il savait si bien parler.
Alors, se remémorant  l'exhortation de Virgile  dans l'Eneïde, que Voltaire citait souvent dans sa correspondance,  on pourrait dire:
"... macte animo,  generose puer,  sic itur ad astra !" 
Ambrussum -via Domitia
                                                                                                         

Freelance Writer 
N-L. M.  
Culture  Art  Patrimoine  
 

samedi 13 octobre 2012

La tête dans les nuages

Dans nos horizons urbains ils s'élèvent de plus en plus haut, de plus en plus nombreux ...: Gratte-ciel, skyscraper, Wolkenkratzer, Rascacielos ....: peut-on parler d'une fascination pour les immeubles ultra modernes qui, tels les grandioses monuments antiques, s'envolent, en  gigantesques formats,  pour tenter d'atteindre les nues ?
S'agit-il seulement d'audaces d'architectes, d'ambitieux projets municipaux, de recherches de bâtiment symbole pour des cités en mal d'identité ? Ou peut-être est-ce simplement un condensé de ces raisons ?  L'art, allié à l'utilité, donne alors naissance à des bâtiments d'exception. Les budgets consacrés sont assortis à la performance et souvent décriés par les élus locaux, car  les coûts initiaux sont largement dépassés. Les marchés d'offres donnent parfois lieu à de vraies batailles de plans et des rivalités d'architectes au détour de croquis aussi sophistiqués que farfelus. Mais la profession semble avoir le vent en poupe , car on n'a que l'embarras du choix ( si ce n'est pas le prix) parmi une belle palette de noms prestigieux auxquels se rattachent d'étonnantes réalisations .
Matthias Sauerbruch et Louisa Hutton
Jean Nouvel-( la Mairie de Montpellier)
L'art et l'urbanisation n'étaient pas destinés à  faire bon ménage dans la période moderne. Sans remonter aux décors antiques  des rives niliennes, on peut noter une évolution du bâti au cours des âges en fonction des aléas économiques et démographiques de chaque nation. L'architecture urbaine, éclose sur tous les continents, développe les mêmes critères de base. Le challenge est  similaire pour chacun:   sur une surface réduite, faire un bâtiment de grande capacité, en y incluant l'esthétique, et en tentant de  respecter  une enveloppe financière fixée au départ du projet .. Optimiser, rentabiliser  l'espace, en apportant un aspect artistique,  si possible, innovant, mais qui ne défigure pas l'ensemble de la cité, voilà un vrai défi, dont on peut admirer d'année en année la concrétisation ..car elle est actuellement très médiatisée..
Renzo Piano ( centre Pompidou)
Si le choix de l'implantation est  parfois un dilemme : centre ville ( quartier City) ou banlieue ( si le centre est classé et ancien ), la présentation est   souvent identique . Après un accès imposant ( grande allée ou parvis, lorsque l'espace le permet), on accède à un  hall d'accueil monumental. Pour diversifier la fonctionnalité du lieu ( immeuble non exclusivement dévolu aux bureaux) , on a repensé les attributions. Ce sont actuellement:  des écoles, des universités, des salles de concert, de conférences, de projections, de réunions, des entreprises, des commerces, des entrepôts.. qui se partagent l'espace et les étages. La construction se veut, dans certains cas, écologique. La géothermie, les énergies renouvelables, sont incluses dans les plans , et les murs végétaux habillent des façades austères,  en accord avec des jardins aménagés sur des terrasses en hauteur. L'allure  générale est soucieuse de la ligne particulière de chaque élément. La couleur, le style, entrent dans la décoration extérieure comme dans celle de l'intérieur, répondant ainsi à l'exigence artistique revendiquée désormais par chaque architecte. Laisser pénétrer la lumière par des découpes géométriques, agencer les bâtiments entre eux,  en courbes et sinusoïdes qui mettent en valeur les rapports entre verticalité et horizontalité, sont désormais des incontournables de ce genre de réalisation. On est bien loin des blocs massifs, uniformes, froidement alignés en rues parallèles et symétriques, très représentatifs d'une certaine époque où les moyens financiers n'autorisaient pas la fantaisie en bridant le choix des matériaux. L'acier, le verre, le bois, conjugués au béton, ont allégé l'aspect global, en tentant d'humaniser l'ensemble.
"L'architecture d'aujourd'hui, c'est souvent le patrimoine de demain"...était  une formule du  ministère de la Culture et de la Communication, qui, en novembre 2002, lançait  une campagne d'intérêt général,  en faveur de la qualité architecturale. Encourager la créativité,  relancer l'économie du bâtiment en œuvrant durable,  pour le futur et les générations à venir, voilà ce qui, dix ans plus tard, se  poursuit. Un bâti témoin d'une époque et de ses savoir-faire.
O. Niemeyer (cathédrale de Brasilia)
Quelques sites web:
 l'architecture japonaise 日本建築  :
-  les architectes japonais contemporains
les architectes européens
-  la thèse de A. Boutinot ( 2011-Université de Grenoble)

Freelance writer
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jeudi 4 octobre 2012

Cabarets spirit

J. Fletcher Le lapin agile
Le XIX° siècle a vu l'âge d'or des établissements Montmartrois , en cette fin de 2nd Empire,  où l'on venait s'encanailler au pied de la Butte,  mais où l'on venait  s'y distraire avant tout. A la différence des cafés artistiques et littéraires, où l'on débattait, l'esprit des Cabarets  était un ton donné par la fréquentation des lieux .. La palette était chamarrée et ses couleurs prenaient forme sous les doigts des graphistes, des peintres, des sculpteurs qui n'hésitaient pas à laisser leur talent s'exprimer jusque sur les murs ou dans la décoration de l'établissement:
Henri Rivière
Balda  et son tableau "le Chat noir" , cabaret dont la lanterne de la façade est une création d'Eugène Grasset, l'enseigne est due à Alex Charpentier,  la silhouette du chat et de son lunaire croissant sont d'Adolphe Willette...
Que ce soient : "la nouvelle Athènes " en 1855, "le lapin à Gilles" en 1875, "le Chat noir"en 1881, et plus tardivement "le Rat mort" en 1930, chacun d'entre eux a connu des heures de gloire où les célébrités se disputaient la vedette autant dans la salle que sur l'estrade. Du théâtre d'ombres d'Henri Rivière (en 1886) aux couplets de l'homme à la rouge écharpe : Aristide Bruant, la foule se pressait pour assister aux diverses animations  proposées lors de soirées mémorables. On y brocarde, invective, critique, caricature, dénonce aussi, à travers des refrains et des représentations picturales.. Mais l'on respecte les interdictions, qui sont alors en vigueur,  pour accéder au cabaret:
-pas de religieux, pas de militaires, pas de femmes non chapeautées ni d'ouvriers en casquette !
Cependant la liberté de ton était admise. La chanson était réaliste, engagée, polémique, dans un argot poétique aussi imagé que percutant. ( à écouter sur Youtube les enregistrements de l'époque où l'on peut entendre A. Bruant dans ses célèbres airs de chansonnier : "Chant d'Apaches", "A la Bastille", "Belleville-Ménilmontant" , ou  la version de Patachou : "Aux frais de la princessse"....)
C'est donc une belle et indispensable exposition "Autour du Chat noir" que le Musée de Montmartre propose aux visiteurs jusqu'au 13 janvier 2013, à Paris. Témoins d'une époque révolue, ou qui a évolué, les Cabarets  ont gardé leur esprit.  Celui-ci ne s'exprime pas de la même façon de nos jours, mais il a su trouver ses marques dans un langage actualisé. Et la promenade sur la Butte, à travers les rues du Montmartre d'aujourd'hui, n'est pas un pèlerinage nostalgique, c'est une déambulation de mémoire, un regard de reconnaissance à jeter sur les murs d'un autre temps qui, comme les visages aimés, ont souvent  gardé quelques rides..

Freelance Writer
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