vendredi 1 mars 2013

813-2013 Santiago de Compostela

Théodomir
St Jacques le Majeur
Depuis 1200 ans, à travers les siècles et   par maintes voies, venant des 4 coins de l'Europe les  pèlerins marchent vers Compostelle... C'est vers 813, en Espagne ( Provincia de La Coruña,   Galicia)  en un champ nommé Campus Stellae,  que l'on (l'ermite Pélage ou  l'évêque Théodomir ???) découvrit le tombeau d'un Saint (St Jacques le Majeur) et quelques ossements, dont on admit qu'ils furent siens. Depuis lors l'endroit, où l'on a érigé un imposant édifice religieux,  est devenu lieu de pèlerinage catholique. Qu'il fut expiatoire, reconnaissant, support de vœu, votif,  ou de quémande, le trajet fut une réelle motivation autant que la destination.
Mais que va-t-on chercher aux chemins de St Jacques ?...
Santiago de Compostella
Un pèlerinage commence toujours par une décision. Celle-ci mûrit parfois pendant des années avant de pouvoir se concrétiser. Vient ensuite le temps du choix de la route à emprunter, de l'itinéraire qui sera le plus propice (le plus court, au paysage le plus agréable, aux haltes les plus appropriées...) et,  pour cela,  les raisons sont aussi multiples qu'individuelles. Pourtant, si l'entreprise est affaire personnelle, on l'accomplit souvent en groupe, ou en famille. Les solitaires s'aventurent rarement, mais il y en a  tout de même.
Muni des attributs du jacquaire (pèlerin du chemin  de St Jacques): bourdon, cape, chapeau "coquillagé",  besace... , le pèlerin médiéval  savait que la route serait longue. Celui du XXIe siècle, même s'il a modifié son équipement pour un confort plus contemporain (chaussures et bâton de marche, sac à dos, vêtements de circonstance, crédencial  (carnet de route à faire tamponner à chaque halte, et qui servira de preuve du pèlerinage accompli), carte géographique ....), n'échappe pas aux inconvénients du périple. La fatigue,  le moral en dents de scie, les surprises (bonnes ou mauvaises), les maux physiques divers selon la saison où l'on effectue  le trajet... sont l'inévitable lot du marcheur sur une longue distance. Les ampoules aux pieds, symbole évident des étapes à franchir, n'ont rien à voir avec les ampoules médiévales (petits récipients en forme de fiole -en étain ou en plomb- ,  témoins  du passage des pèlerins du XIVe et XVe siècles, qui font le bonheur des détecteurs actuels ..), enfouies aux bords des chemins.  En effet, les gens qui entreprenaient ces longs déplacements vers les lieux saints se munissaient de ces petits contenants, afin de   ramener de l'eau bénite , ou des huiles saintes, dont les vertus bienfaisantes devaient  délivrer les malades de leurs maux, mais protéger également ceux qui transportaient ces précieux liquides.
Si, dans la littérature spécifique l'on connaît  le "Codex Calixtinus "(ouvrage dont certains chapitres  sont considérés comme   guide du pèlerin) rédigé par le moine Parthenaisien  Aymeri Picaud, on  a plus tardivement quelques volumes reprenant des textes ( de Ch. Nodier, de P. Mérimée, d'A. Dumas, de Th. Gautier...), narrant des parcours  qui rappellent les  régions  traversées par les jacquaires. On peut citer aussi "Récits de pèlerins de Compostelle - de 1414 à 1531" ( éd. La Louve).
Abbatiale de St Gilles-(Photo: C.V.)
Après une période de désertion des routes vers Compostelle, on a assisté, depuis la fin du XXe siècle, à un regain d'intérêt pour ce genre de pérégrination pédestre. Les raisons en sont peut-être différentes qu'au Moyen-Age. La philosophie, l'écologie, ont, pour certains, pris le pas sur la religion. Que l'on soit protestant, catholique, agnostique, athée, on est tenté par le défi. "Etre en recherche" ( de soi, d'une paix intérieure, de réflexion sur le sens de l'existence...), "faire le point", ou "un break",  sont  des expressions qui reviennent le plus souvent dans le discours des candidats. Pourtant "Aimer Dieu, le craindre, le chercher, le (re) trouver.." constitue encore le credo des pèlerins, qu'ils soient hiérosolomitains, romains, lourdais,  lexoviens, ou étudiants (pèlerinage de Chartres). Confronter un élan mystique avec un effort physique soutenu, n'est pas nouveau. Sans pour autant aspirer à une sainteté égocentrique, ou à un quelconque sujet de vantardise déplacée, le pèlerin part désormais sur la route, avec son propre objectif, sa recherche, sa quête (qui peut être: l'Absolu), mais toujours nanti d'une ferveur, d'une détermination,  lui permettant d'affronter son Moi intérieur en butte avec un monde extérieur,  souvent ressenti comme menaçant ou antipodique. Le silence, la beauté des paysages variés, les rencontres, les échanges,  le partage, les moments de contemplation, la nature omniprésente, les remises en question,  la découverte de lieux fortement symboliques étaient, et  sont, au rendez-vous.Conques, Rocamadour, St-Gilles, Arles, St Guilhem, Revel ... la plupart des édifices offrent aux marcheurs de Compostelle, l'émerveillement de leurs voûtes romanes, la richesse architecturale de leurs sculptures expressives à message, ainsi que le recueillement entre leurs murs aussi rassurants qu'historiques. Tradition ancrée dans la vie  des nations, le pèlerinage a été pratiqué par toutes sortes d'individus, qu'ils soient de haute ou de modeste condition : les  monarques, les membres de leur famille, les nobles, les commerçants, les paysans, les militaires, les bourgeois, les ecclésiastiques... se sont inclinés près du tombeau d'un saint vénéré. De nos jours, il est perçu comme une victoire sur soi-même, permettant,  outre le souvenir d'une période à part dans une vie, une occasion  de la repenser et parfois de prendre enfin une décision que l'on n'arrivait pas à envisager.

Freelance Writer 
Culture  Art  Patrimoine

Cardinal F. Marty- pèlerinage de Chartres 1971-




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